Côte d'Ivoire - Laurent Gbagbo, le bilan avant l'heure...

Publié le par Dozowoulé

Décidément, le parcours politique de Laurent Gbagbo, beau-parleur et démagogue devant l’éternel, est facile à écrire : sang, pillage des deniers publics, promotion de l ‘incompétence, etc. Le manteau de simple chef d’état est trop lourd à enfiler pour lui, à plus forte raison celui d’un Lumumba ou d’un Thomas Sankara, n’en déplaise à ses partisans. Pour célébrer son échec, il a entrepris depuis quelques semaines de décapiter la filière café-cacao, celle qui lui permettait de se gausser des dirigeants occidentaux tout en continuant de quémander l’aide internationale.

Pour prendre le pouvoir, Laurent Gbagbo a misé sur le tribalisme. Il connaissait les faiblesses des populations du Sud, les siens, et a donc réussi sans peine à leur faire croire que l'économie nationale était la chasse gardée des nordistes, les Dioulas, et que la seule solution à leur bonheur était de chasser ces "envahisseurs". Joignant l'acte à la parole, il leur a donné les moyens de massacrer ces "étrangers". C'est donc dans le sang que Laurent Gbagbo est monté sur le trône fin septembre 2000. Qui ne se souvient du charnier de Yopougon ? Cet épisode, il le qualifiera cyniquement de "calamiteux".

Après s'être servi des soldats sudistes pour entraîner et armer leurs jeunes frères et les organiser en milices pompeusement baptisées "groupes d'auto-défense", il les récompensera en faisant la promotion de la médiocrité dans l’armée. Il en a résulté la rébellion que tout le monde connaît, celle où des sergents instructeurs et autres caporaux défont avec aisance les plans de guerre élaborés par des généraux étoilés sortis des écoles de guerre françaises et allemandes.

Bref. Ainsi commença la "refondation" de la Côte d'Ivoire. Limogeages sur une base tribale dans la haute administration, nominations sur la même base dans l'armée, la gendarmerie et la police, exécutions sommaires toujours sur la même base dans les rues d'Abidjan et dans les villes et villages du Sud, pillage organisé d'entreprises privées et de commerces, etc. La liste des exactions impunies de ce régime n'est pas exhaustive.
Sur le plan économique, depuis qu'il est au pouvoir, le peuple ivoirien n'en sait pas plus sur le diamant, le pétrole, le café, le cacao et autres richesses naturelles qu'il accusait pourtant Houphouët de voler. La gestion de ces richesses est devenue au contraire, encore plus opaque, avec la dissolution de la Caisse de stabilisation et la création à la place d'une multitude d'organismes à la tête desquels ont été parachutés des va-nu-pieds.
Mais puisque la communauté internationale n'est pas bête, elle ouvrira progressivement les yeux, décrètera un embargo sur les armes et le diamant, et fermera progressivement le robinet de l'aide internationale, tout en mettant la tête de certains criminels à prix. Mieux, elle demandera des audits des filières essentielles, obligeant nos refondateurs de salon à changer leur fusil d'épaule.

Connaissant le sort qui lui est réservé, Laurent Gbagbo a donc décidé de prendre les devants. Les premiers responsables de structures dirigeantes de la filière café-cacao ont été mis aux arrêts le mercredi 18 juin 2008: Henri Kassi Amouzou (président du Fonds de développement et de la promotion des activités des producteurs de café et de cacao / FDPCC), Théophile Kouassi (Secrétaire exécutif du FDPCC) et Mme Obogui née Houssou Aménan Rosine (DAF au FDPCC). Suivront, entre autres Mme Angeline Kili, seconde épouse du président du Front populaire ivoirien (FPI, parti présidentiel) Pascal Affi N'guessan, et même Placide Zoungrana, PCA de l'Autorité de régulation du café cacao (ARCC). Le cas de ce dernier est intéressant parce qu’il était l'un des hommes clés du FPI à l'opposition. Mais il n'a pu être nommé ministre de l'agriculture à cause de son patronyme "Zoungrana" appartenant à l'ethnie Mossi du Burkina Faso. Le FPI ayant choisi le tribalisme comme fonds de commerce, ceci explique cela. La présidence du conseil d’administration de l’ARCC ne visait donc qu’à consoler cet ancien compagnon de lutte...

Après les têtes de la filière café-cacao, les bruits courent que les prochains sur la liste, sont les responsables de l'affaire des déchets toxiques qui avaient semé mort et désolation à travers Abidjan. Suivront peut-être les pilleurs du pétrole et des autres richesses. Ainsi saura-t-on peut-être combien de milliards Blé Goudé et Simone Gbagbo ont pompés avec la bénédiction du ministre Monnet Léon pour alimenter les stations Lubafrique…
On le voit donc, en fait d'opération main propres, Laurent Gbagbo veut enlever à la justice le plaisir de lui faire payer ses crimes. Mais peine perdue. Son tour arrivera lorsqu'il aura fini de débarrasser le pays des bandits qui l'ont plongé dans les ténèbres, à savoir les cadres du FPI. Aussi vrai que Omar El Béchir, Jean-Pierre Bemba ou Charles Taylor rendent ou rendront compte devant la Cour pénale internationale. En attendant, la communauté nationale et internationale a sous ses yeux le bilan du mandat élastique de Laurent Gbagbo.

 

Publié dans Politique

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